samedi 29 décembre 2018

Ces jeunes tunisiens qui brillent au Sommet de Lugano

Publié le 27 août 2018



Ils s’appellent Maher, Amina, Molka, Sofiane, Zeineb, Nouha, Yosr et Youssr. Ils ont tous entre 24 et 32 ans, ont réussi leurs études supérieures en Tunisie et/ou à l’étranger et commencé une carrière professionnelle prometteuse. Activement investis dans la société civile, ils ont été sélectionnés pour participer au Sommet de Lugano 2018, des jeunes de la Méditerranée et du Moyen-Orient. Tout au long des dix jours du Forum qui a précédé le Sommet, avec près de 150 autres de leurs pairs venus de 30 pays, ils n’ont cessé de débattre, d’échanger, de confronter leurs expériences. Quitte à perdre nombre de leurs illusions avant d’aboutir à des initiatives à même de fonder une part de l’avenir. Ils se distingueront davantage au cours des séances plénières du Sommet, au Palais de Congrès, en participant aux panels de discussion et interpellant, par des questions pertinentes, les ministres, ambassadeurs, penseurs, et autres chercheurs intervenants.



Ravis de les rencontrer, les officiels tunisiens délégués au Sommet ont eu un vrai moment de bonheur à s’entretenir avec eux, sans langue de bois, en totale interaction. Le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Marouane El Abbassi, le premier conseiller auprès du président de la République, chargé de la Sécurité nationale, Kamel Akrout, le Secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, Sabri Bachtobji et l’ambassadeur de Tunisie à Berne, Mourad Bourehla ont prêté à ces jeunes une écoute attentive.



Maher Bayahi, 32 ans, était banquier à la City, Londres, spécialisé en private equity. Janvier 2011 sera un grand déclic pour lui. Il revient en Tunisie, rejoint MG, la chaîne de grande distribution, au département des ressources humaines où il considère qu’il peut être le plus utile. La fibre sociale et la volonté de servir l’emportent en lui au business. La grande propre interrogation qu’il se pose à chaque réveil : Comment pourrais-je être utile, à ma communauté ? Mûri par ses années au cœur de l’action en Tunisie, il affirme humblement, comme le pensent nombre de ses pairs : ‘’On est prêt à prendre le relais, en tant qu’acteurs de changement. Mais aussi à tisser le nécessaire et enrichissant lien générationnel.’’



Amina El Abed, est diplômée en Administration des Affaires (MSB) et en Relations diplomatiques (Mastère à Birmingham). Elle a notamment été auditeur interne en Chine. De retour à Tunis, elle a créé un cabinet international de conseil en stratégie, spécialisé dans la communication, la gestion de la réputation, la communication de crise, la prévention de l’extrémisme et de la radicalisation des jeunes. Ses clients sont des gouvernements, des organisations régionales et internationales, des centres d’étude et de recherche… Fière de ses origines tunisiennes ancrées à Nefta, dans le Djérid, Amina nourrit un grand projet pan-régional : réconcilier les jeunes avec leurs gouvernements, ‘’c’est-à-dire, les gouvernements avec la jeunesse de leurs pays’’, précise-t-elle.



Molka Abbassi, enchaine les diplômes et les pays d’études, puis de travail. Diplômée de l’IHEC Carthage, elle partira aux Etats-Unis, décrochera un mastère en Economie de Développement en Angleterre, approfondira ses études économiques à HEC Lausanne et sera accueillie en stagiaire à l’OCDE. Mais, c’est au Bureau international du Travail (BIT) à Genève qu’elle s’investit actuellement, en collaborant sur une grande étude à base de statistiques et de veille mondiale. ‘’De là où je suis, j’essaie d’incarner au mieux ma tunisanité, ma Tunisie, dira-t-elle. Bientôt, Molka Abbassi ira s’installer à Dubaï, au sein d’un grand cabinet international de conseil en stratégie. ‘’Mes choix essayent d’être raisonnés, lâche-t-elle, en toute modestie. Mon fil directeur est en fait d’acquérir le maximum de connaissances (knowledge) et de connaissances (network)… pour les mettre au service de la Tunisie quand j’y reviendrai, ce qui ne saurait tarder.’’ Avec un CV bien riche et un carnet d’adresses qui s’épaissit, Molka El Abbassi fera le bonheur des chasseurs de tête, pouvant lui garantir des packages annuels des plus attractifs dans de prestigieuses multinationales. Mais, son ambition est autre : ‘’La Tunisie, et l’Administration publique !’’ confie-t-elle en toute abnégation. Une leçon de conviction et un message d’espoir.



Sofiene Marzouki, 28 ans, est exceptionnel. Il a déjà créé un business incubateur à Niamey, puis son entreprise à Accra (Ghana), lancé une compagnie d’importation et de distribution de riz au Niger et bientôt en Côte d’Ivoire, contribué au développement de Jumiya en Egypte et le voilà maintenant en Tunisie depuis 18 mois. Sans cesser de développer son portefeuille d’affaires. Né aux Pays-Bas où sa famille avait émigré, il y suivra ses études puis les continuera au Norvège. A 16 ans seulement, il avait commencé à importer des produits à partir de la Chine pour les revendre en Hollande. Mais, c’est à l’âge légal de 21 ans, qu’il établira officiellement sa première expérience. Pourquoi ce retour en Tunisie, et pourquoi en ce moment, précisément ? Sofiane laisse parler son cœur et son intelligence. ‘’C’est un moment exceptionnel. Je dois y être !’’. Le choix d’un vrai ‘’Change-Maker’’.


Zeineb Chaouch a 24 ans et la passion du théâtre dans les gènes. Après une licence en Droit à la faculté des Sciences juridiques, elle est en 2ème année de mastère. ‘’En fait, tout se marie en moi : les arts et le droit, la société civile et plus tard la carrière professionnelle, le présent et l’avenir’’, nous confie-t-elle. Lugano sera pour elle son premier voyage à l’étranger, et une grande opportunité de ressourcement et de networking. ‘’Vous ne pouvez pas imaginer combien tous ses contacts et ces échanges sont stimulants pour moi’’, s’exclame Zeineb, la tête pleine de projets.



Nouha Belaid, diplômée de l’IPSI est journaliste, communicatrice et consultante. Son parcours universitaire et professionnel s’est croisé entre la Tunisie, la France, le Canada et d’autres pays. Très active dans les réseaux associatifs, elle s’implique dans les projets et débats sur les nouveaux médias et les enjeux de la communication. Là où elle va, elle n’oublie jamais de porter autour du cou une khomsa tunisienne, insiste-t-elle.



Yosr Belkhiria, 28 ans, est journaliste à l’Agence Tunis-Afrique Presse (TAP), après une première expérience à La Presse, dans la version électronique La Presse News. Parallèlement à une thèse de doctorat qu’elle s’apprête à finaliser et soutenir, elle s’implique dans l’associatif. Ses années d’études à Grenoble lui avaient déjà montré la voie. Mais, le contexte tunisien lui offre à présent des opportunités exceptionnelles d’accomplissement personnel… au service des autres.



Yosser Belguith, 24 ans, originaire de Sidi Makhlouf à Médenine est déjà une icône dans le Sud tunisien. Après des études en Business Administration et marketing, elle se décidera à s’établir à Médenine pour y ouvrir le premier coworking center. Tous l’en dissuadaient, mais sa détermination l’a emporté. Le succès n’a pas tardé à poindre. Et la voilà rayonnante de bonheur, partageant son expérience dans de nombreux forums où elle est sollicitée à l’étranger, et surtout à l’affût de nouveaux projets. Allier business et service à la communauté, les jeunes entrepreneurs de surcroît, est pour Yosser Belguith plus qu’une véritable vocation, une mission.

Ils sont dans les nouveaux codes

Huit profils en mosaïque dessinant les contours d’une nouvelle jeunesse tunisienne qui émerge, s’impose et promet. Ce qui les distinguent le plus, c’est ce degré de maturité dont ils font montre, leur modestie naturelle et leur volonté d’être utiles aux autres. Réussir pour eux n’est pas de se mettre sous les feux de la rampe, de gagner de l’argent et d’occuper de hautes positions professionnelles et sociales, mais de servir. Un autre mental qui rompt avec l’état d’esprit de nombreux jeunes leaders éblouis par les golden boys & girls. Ils sont dans les nouveaux codes, ce qui seront les plus profitables à la Tunisie. Lugano a le mérite de les révéler.
Taoufik Habaieb, envoyé spécial de Leaders à Lugano (Suisse)



vendredi 21 décembre 2018

Arlette Monnard-Elhajhasan, une Genevoise à l’âme arabe

Par Aline Jaccottet ,Publié lundi 13 août 2018 à 19:53, modifié mardi 14 août 2018 à 20:48.

Arlette Monnard-Elhajhasan, une Genevoise à l’âme arabe

Par amour et goût de l’aventure, l’Helvète a abandonné le confort de son pays pour s’immerger dans le monde arabe. Une exploration de toute une vie qu’elle ne regrette pas un instant

Ne vous fiez ni à sa blondeur ni à ses yeux verts: après quasi quarante ans passés au Proche-Orient et au Maghreb, Arlette Monnard-Elhajhasan est Arabe. Généreuse dans l’accueil, le verbe haut et l’émotion spontanée, ses gestes respirent l’aisance de ceux qui sont habitués à voguer d’un monde à l’autre. En Suisse, sa nature expansive détonne; en Tunisie, en Jordanie et en Cisjordanie, on s’étonne qu’une ajnabia (étrangère) maîtrise à ce point une langue et des codes si complexes. C’est qu’Arlette, infirmière de profession et originaire de Chambésy (GE), a vécu des années en Palestine rurale avant de s’établir à Djerba.

Un réveillon décisif

Son destin bascule à Londres, lors du réveillon du 31 décembre 1970. Elle qui était venue suivre une école d’infirmières rencontre Hasan, un étudiant en gynécologie palestinien. L’homme est issu de la tribu bédouine turkmène Achira qui vit depuis 1948 à Nazalwasta, petit village de Cisjordanie entre Tulkarem et Jénine. C’est le coup de foudre, puis le mariage et quatre naissances: Abdulmuti en 1972, Raya en 1974, Yasmine en 1975 et Khaled en 1977.

Hasan ne veut pas quitter l’Angleterre, mais Arlette, en mal d’exotisme, rêve de voir la Palestine. Sa persévérance a raison des réticences de son mari et le 15 mai 1979, la famille quitte Londres pour Nazalwasta, à la stupeur des parents et de la sœur d’Arlette. Laquelle atterrit dans un monde arabe rural qui lui réserve quelques difficultés. «J’ai eu de la peine à me faire à la séparation hommes-femmes pratiquée strictement par les Bédouins», dit-elle. Et puis, la vie est spartiate: pas de téléphone, des toilettes à la turque, des serpents et des lézards qui s’invitent à l’improviste dans la maison, des moustiques omniprésents… Surtout, Arlette doit se familiariser avec la langue et la culture de sa belle-famille. Tous les soirs, elle apprend un mot d’arabe, aidée par ses belles-sœurs et encouragée par son inénarrable belle-mère, Jitti, une vieille Bédouine ridée et tatouée qui mange avec les mains et avec force bruits de bouche. Arlette se fond tout entière dans cette nouvelle vie, embrassant l’islam qu’elle pratique dans un mélange serein de décontraction et de respect des traditions.

Mille naissances

Les quinze années qui suivent laissent peu de place aux regrets, aucune aux loisirs. Arlette l’infirmière et Hasan le gynécologue font équipe pour accoucher des centaines de femmes. «Pas une n’est morte entre nos mains», dit-elle avec fierté. Un exploit au vu de la dureté de la vie des mères souvent harassées par le travail des champs, et des conditions humaines et sanitaires des naissances. Lorsqu’elle revient en Suisse pour de courts séjours, Arlette ne s’y retrouve pas, entre la rigidité de sa famille qui l’étouffe et «les préjugés des gens qui avaient tant de peine à penser que j’étais la mère de ces quatre enfants qu’ils imaginaient que je travaillais comme nounou pour une famille saoudienne».

Exilée dans sa patrie

C’est pourtant en Suisse que la famille trouve refuge lors de la première Intifada. «Quitter la Palestine nous a brisé le cœur, mais les checkpoints, les militaires israéliens, la paranoïa, on n’en pouvait plus. Nos enfants adolescents auraient pu être arrêtés, voire pire», dit Arlette. Elle se préoccupe particulièrement du sort de son aîné, Abdulmuti, qui souffre de myopathie, une dégénérescence musculaire grave. Les Elhajhasan s’établissent à Saint-Imier, dans le Jura, où Hasan a trouvé un poste. Au soulagement d’être en sécurité succède rapidement la difficulté de l’intégration. «Nous avons été confrontés au racisme, à l’ignorance», raconte Arlette. Quatre ans plus tard, trois des quatre enfants partent étudier en Jordanie où ils se sentent bien plus à l’aise. Arlette et Hasan rentrent à leur tour en Cisjordanie, mais d’autres problèmes les attendent. «La corruption, l’autoritarisme, le clientélisme établis par le clan Arafat nous ont écœurés. On ne pouvait rien faire sans être membres d’un parti», explique-t-elle. Déçu de ce pays dans lequel il ne se reconnaît plus, le couple rentre en Suisse. Un drame les frappe alors: le rapt de leurs deux petits-fils en 2000 par leur père, un Palestinien de Cisjordanie. Il faudra des années à leur fille Raya, souffrant d’une grave anorexie qu’avait adoucie la maternité, pour surmonter cet arrachement. Deux ans plus tard, la vieille Jitti, la belle-mère bédouine adorée, rend l’âme.

Le pays de la liberté

Arlette tombe alors en dépression. «Les années à trimer, l’Intifada, la maladie de mes enfants, le kidnapping de mes petits-fils…, soudain, tout m’est tombé dessus», dit-elle. Elle réalise aussi combien le caractère possessif de Hasan lui pèse et décide de partir seule en vacances pour décompresser. «J’ai tapé «vacances + soleil» sur Google et je suis tombée sur une pub pour la Tunisie.» Ni une ni deux, Arlette débarque dans ce pays inconnu et en tombe amoureuse. «La nature, les paysages, la gentillesse des Tunisiens m’ont fait un bien immense.» La liberté l’appelle, elle répond: trois ans plus tard, à la stupeur de tous, elle divorce de Hasan sans rien lui demander. «Il m’avait déjà donné tout ce que j’aurais pu souhaiter», dit-elle. Arlette achète un appartement à Djerba, où elle vit depuis neuf ans. Revenir en Suisse, où ont fini par s’établir trois de ses enfants? A cette idée, elle rigole. «Ce pays est magnifique, propre et organisé, mais il ne me correspond plus. Je ne supporterais pas le train-train, l’ennui et la grisaille de la météo. Les gens sont si moroses… Décrocher un sourire dans les bus genevois, c’est un exploit!»
N’allez pas croire pour autant qu’elle tresse des couronnes à la Tunisie. «Certains endroits sont très sales, la corruption est omniprésente, les infrastructures sont défaillantes et la société est anarchique», fustige-t-elle. Sans jamais oublier la Palestine, c’est pourtant là qu’elle se sent chez elle, dans ce pays nouvellement libéré qui lui ressemble tant. Une Tunisie entre deux mondes, l’arabe et l’européen, passant de l’un à l’autre dans une quête identitaire à jamais inachevée.

Profil

1951 Naissance à Chambésy (GE).
Mai 1979 Arrivée à Nazalwasta (Cisjordanie).
1988 Retour en Suisse à Saint-Imier dans le Jura.
Mai 1992 Retour en Cisjordanie.
2009 Arrivée à Djerba.





samedi 15 décembre 2018

Un artiste non européen peut-il travailler en Suisse?



Par Anna Vaucher, 25 sept. 2012

Marché du travail

Une Tunisienne, diplômée de la HEAD de Genève, peut-elle présente-t-elle un «intérêt scientifique ou économique prépondérant» pour le pays?


Boutheyna Bouslama a obtenu un master puis un postgrade, en juin, à la Haute Ecole d’art et de design (HEAD)Image: Olivier Vogelsang

Depuis quelques semaines en ville de Genève, 2000 imitations de livrets pour étrangers se cachent dans le tram, dans les bars ou sur les panneaux d’annonce de la Migros. Ils sont l’œuvre de l’artiste tunisienne Boutheyna Bouslama qui, à l’intérieur, questionne le statut administrativement délicat des artistes étrangers.

Ces tirages, distribués dans l’espace public, font partie d’un diptyque, composé d’une vidéo, Mama Habibti . Une jeune femme arabe lit un ensemble de lettres adressées à sa mère, lui faisant part de difficultés rencontrées à la frontière roumaine. Ce diptyque lui a permis de figurer parmi les trois lauréats des Bourses de la Ville, dont le Centre d’art contemporain expose actuellement les œuvres des seize nominés.

Mauvais signes
Ce n’est pas un hasard si la jeune trentenaire a choisi ce moment pour marquer son attachement à sa ville d’adoption. Ayant obtenu un master puis un postgrade, en juin, à la Haute Ecole d’art et de design (HEAD), son permis B d’étudiant extra-européen prend fin. Si la Loi sur les étrangers stipule que le bénéficiaire doit alors quitter la Suisse, l’initiative de l’ancien conseiller national Jacques Neirynck visant à éviter la «fuite des cerveaux» devrait faciliter les démarches pour l’obtention d’un permis de travail. Depuis janvier 2011, l’article 21 ajoute qu’un étranger titulaire d’un diplôme d’une haute école suisse reconnue peut obtenir un permis si son activité lucrative revêt un intérêt scientifique ou économique prépondérant. Il bénéficie de six mois à compter de la fin de sa formation pour trouver un tel emploi.
Pour Boutheyna Bouslama, il est déjà trouvé. Elle occupe un poste d’assistante à la HEAD, qui prend fin dans un an. Pourtant, les signaux sont mauvais. La direction générale de la HES-SO qui doit formuler la demande auprès de l’Office cantonale de la population (OCP) est plus que perplexe quant à l’obtention d’un tel permis. Le Centre de contact Suisses-Immigrés aussi: «Avec les accords bilatéraux, l’obtention de permis de travail s’est assouplie pour les membres de la Communauté européenne, et par un effet de vases communicants, s’est durcie pour les extra-Européens, explique la porte-parole Marianne Halle. Je serais très étonnée que dans le cas d’un artiste, la Suisse estime qu’il y a un intérêt prépondérant à ce que cette personne reste ici.»
Pour appuyer son dossier, Boutheyna Bouslama bénéficie du soutien de plusieurs personnalités. «Elle fait partie de la scène artistique genevoise, explique Christian Bernard, directeur du Mamco. J’ai eu vent de sa situation et je me suis proposé de faire les démarches nécessaires pour la soutenir. Genève a de la peine à attirer des artistes de l’extérieur, notamment à cause du coût de la vie. Si on ne fait rien pour favoriser le maintien des gens présents, la ville va perdre ses forces vives.»
La culture, une distraction?
Jean-Pierre Greff, directeur de la HEAD, affiche le même constat inquiet. «Il y a un autre problème sous-jacent: la perception de l’art comme un élément de distraction, qui n’est pas essentiel au développement économique de la cité. L’école compte moins de 5% de diplômés extra-européens. La plupart d’entre eux repartent. Leur pays d’origine bénéficie ainsi de leurs compétences et notre école se fait connaître au-delà des frontières. Mais ce serait une chance pour nous de pouvoir garder des gens d’une qualité particulière dès lors que nous avons la possibilité de les engager. C’est un moyen de favoriser le dynamisme de la scène genevoise.»
Selon Jacques Neirynck, la question ne devrait pas se poser: «Le terme «prépondérant» porte à des interprétations douteuses contre lesquelles il faut se battre. Dire que la culture n’a pas d’intérêt économique est un préjugé qui n’est pas inscrit dans la loi.» Le dossier sera bientôt remis entre les mains de l’OCP. Si sa décision se révélait négative, ce serait «un gâchis», note Barbara Fédier, qui suit l’artiste dans ses démarches. «Boutheyna est mon assistante depuis deux ans, je l’ai formée; ce serait incompréhensible de ne pas la laisser terminer son mandat.»
(TDG)
Créé: 25.09.2012, 08h01

samedi 8 décembre 2018

Protestation à l'ambassade de Tunisie

Une quarantaine de Tunisiens ont passé la journée de mercredi devant l'ambassade de Tunisie à Berne. Ils réclament leur passeport.



Les manifestants se disent prêts rester là aussi longtemps qu'ils ne recevront pas leur passeport.



Depuis lundi, des exilés exigent que les autorités tunisiennes leur remettent leur passeport, ce que celles-ci refusent. L'action est appelée à se prolonger.

Une trentaine de Tunisiens désirant rentrer au pays après le changement de régime se trouvaient encore en soirée devant l'ambassade, où des couvertures leur ont été apportées, a constaté un journaliste de l'ATS. Ils se disent prêts à passer la nuit et à rester là aussi longtemps qu'ils ne recevront pas leur passeport, un droit personnel, précisent-ils.



«Certains ont même donné les papiers nécessaires et ont reçu des promesses de la part des responsables de l'ambassade pour avoir leurs passeports aujourd'hui même», a écrit mercredi soir dans un communiqué le coordinateur du Comité de soutien du peuple tunisien (CSPT), Anouar Gharbi. «Ces promesses n'ont pas été respectées, ce qui a révolté les gens qui ont tellement envie de rentrer au pays après plusieurs années d'exil».

«Ces gens sont déterminés»

«Nous demandons donc à nos compatriotes fonctionnaires de l'ambassade de comprendre l'urgence de la situation et de faire le nécessaire pour délivrer les passeports dans les meilleurs délais», a ajouté le Comité de soutien. Jusqu'à maintenant, seuls cinq passeports ont été délivrés.

Selon M. Gharbi, ce mouvement, soutenu par son comité, est «spontané». Et il pourrait durer: «Ces gens sont déterminés», a-t-il averti. «Nous resterons là jusqu'à obtenir gain de cause», a confirmé sur place un immigré tunisien, Ibrahim Naouar.

Devant l'ambassade, dans le quartier des représentations diplomatiques de Kirchenfeld, le climat était parfois tendu mercredi, mais il est resté pacifique. On entendait ça et là des cris contre l'ex-chef de l'Etat Ben Ali. La police contrôlait la situation et se préparait, elle aussi, à passer la nuit là. (ats)

19.01.2011, 19:35