vendredi 19 mai 2017

En Tunisie, son père l’avait initiée au basket

Portrait Marie-Rose Fernandez, présidente de l’Espérance Sportive de Pully.

Par Gérard Bucher

Image: VANESSA CARDOSO

Mme la présidente de l’Espérance Sportive Pully sonne les cloches à ses ouail­les à la moindre incartade. Qui, parmi ses protégées (une centaine aujourd’hui), n’a jamais effectué des tours de salle pour s’être présentée en retard à l’entraînement? Marie-Rose ne sourit pas beaucoup, sauf peut-être lorsque l’une de ses formations s’illustre sur le parquet. On aurait presque peur de lui adresser la parole si on ne savait pas qu’elle cache bien son jeu. Car, sous ses airs parfois renfrognés, Marie-Rose Fernandez possède un cœur gros comme ça. Jean, son mari depuis quarante-quatre ans, le constate tous les jours. «Il faut la connaître, assure-t-il. Elle est toujours prête à rendre service. Pour cette raison, et pour bien d’autres, je suis toujours fou amoureux de ma femme.»

Doux souvenirs de jeunesse

Tout comme son mari, Marie-Rose Fernandez est nostalgique de l’époque où elle coulait des jours heureux à Nabeul, ville située à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Tunis, où elle est née. «Mon père, Eugène, d’origine saint-galloise, était à la tête d’une entreprise chargée d’électrifier le nord-est de la Tunisie. Tout le monde le connaissait. C’est lui qui a lancé le basket et la natation à Nabeul, en 1930. Ce n’est pas par hasard si je fonctionne comme lui.»

Marie-Rose se souvient des matches de basket qu’elle allait suivre en compagnie de son père. «A l’époque, Jean était une star au sein de l’Avant-garde de Tunis, s’emballe-t-elle. Toutes les filles étaient folles de lui. Il faut dire qu’il était beau gosse.»
Marie-Rose a traversé la Méditerranée à contrecœur. «Après avoir décroché mon bac français en Tunisie, je me suis inscrite à l’Université de Lausanne en fac de biologie. J’ai vécu brièvement à Paudex avant de m’installer à Pully. Le contraste a été saisissant pour moi. En Tunisie, mon frère et moi avions un chauffeur et trois bonnes à disposition. En Suisse, j’ai dû me débrouiller toute seule. Je devais gérer mon budget. J’ai été surprise par la difficulté de nouer des contacts avec les gens. Les portes me claquaient souvent au nez.»

Le club est fondé le 6.9.69

Le basket lui a permis de rebondir. «En biologie, explique Marie-Rose, nous n’étions que trois filles sur un nombre impressionnant de garçons. Jouer au basket nous intéressait, mais il n’était pas facile d’intégrer une structure. J’ai songé à rejoindre Pully Basket. Les filles n’y étaient malheureusement pas les bienvenues. M. Rochat, le président de l’époque, m’a alors montré le chemin à suivre pour créer un club. Voilà comment est né Espérance Sportive Pully Basket Féminin, en référence avec Espérance Sportive de Tunis.»
Le 6 septembre 1969, l’affaire était dans le panier. Plusieurs titres de champion de Suisse de LNA et de vainqueur de la Coupe ont égrené l’histoire du club dans les années 80. Aujourd’hui, Espérance Sportive Pully occupe le ventre mou du championnat de LNA. Qu’importe, Marie-Rose Fernandez poursuit son chemin sans sourciller. «Si je continue, c’est pour les plus jeunes. Ce sont elles qui me poussent à garder les rênes du club.»

«La Tunisie, ce n’est plus celle que j’ai laissée»

Pendant de nombreuses années, Marie-Rose et Jean Fernandez se ressourçaient en Tunisie, l’été venu. Aujour­d’hui, ils se contentent d’une thalassothérapie à Hyères, entre Noël et Nouvel-An, en compagnie d’amis. «A Pully, il y a toujours quelque chose qui me ramène au basket, déplore-t-elle. Dans le sud de la France, je ne suis joignable qu’en cas d’urgence, et encore, je n’ai pas de téléphone portable. C’est Jean qui s’y colle. Quant à la Tunisie, ce n’est plus celle que j’ai laissée.»
Qui se douterait que Marie-Rose aime faire la fête et danser à perdre haleine avec son mari? Devant le petit écran, elle se jette volontiers sur toute émission consacrée à la recherche médicale. Cela lui rappelle l’époque (trente-deux ans tout de même) où elle travaillait à Vers-chez-les-Blanc pour le compte d’une multinationale bien connue. Elle en avait profité pour créer un club de sports et de loisirs destiné à ses collègues. Cela n’étonnera personne. (24 heures)


Carte d'identité

Née le 13 mars 1947 à Nabeul (Tunisie).

Cinq dates importantes
 
1968 Quitte la Tunisie pour étudier la biologie à l’Université de Lausanne.

1971 Mariage avec Jean, qu’elle a connu à 16 ans en Tunisie.

1972 Naissance de Mathias, futur international suisse de basket.

1976 Décès de son père, Eugène Graf, avec lequel elle avait beaucoup d’affinités.

1997 Décès de sa mère, Grâce, qui trouvait toujours une solution à tout et savait rester positive dans n’importe quelle circonstance.

Créé: 10.02.2016, 08h54

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