vendredi 5 janvier 2018

Quand l'argent tunisien dort dans les banques suisses...





Le rapport Ziegler étrille les banques suisses








Crédit photo : TDG

Selon le sociologue, la non-restitution des fonds illicites pénalise l'Afrique

Le sociologue suisse Jean Ziegler doit présenter mercredi devant le Conseil des droits de l'homme, actuellement réuni en session plénière à Genève, un rapport sur les fonds illicites. Un groupe de travail a été chargé d'évaluer les conséquences de la non-restitution de l'argent capté par les dictateurs pour les pays concernés. Le document de 20 pages étrille les banques suisses. 


Vos détracteurs ne vont-ils pas voir dans ce rapport un nouveau brûlot antisuisse? 


Je n'attaque pas la Suisse mais les banques suisses. C'est totalement différent. Les diplomates comme Valentin Zellweger à Genève et la Division droit international à Berne font tout leur possible pour accélérer le rapatriement des fonds illicites séquestrés. Cet argent, les gouvernements et leurs populations en ont besoin. Selon la Commission économique pour l'Afrique, les fonds volés au continent dépassent les 50 milliards de dollars. Aujourd'hui, l'argent de Ben Ali et de Moubarak dort dans des coffres en Suisse alors que la Tunisie et l'Egypte en ont cruellement besoin. 


Mais la Suisse s'est engagée à restituer ces fonds 


Cela prend beaucoup trop de temps. Des cabinets d'avocats de la place s'enrichissent en multipliant les recours pour bloquer les procédures. Et pendant ce temps, les banques font fructifier leur pactole. C'est tout bénéfice pour elles puisqu'elles n'ont même plus de comptes à rendre à leurs clients. En outre, la loi n'a rien prévu pour l'argent déposé sur des comptes offshore et qui représente la plus grosse partie de l'argent détourné. 


Que reprochez-vous à l'Autorité de surveillance des marchés financiers (FINMA)?


Son inaction. Elle assure juste l'impunité aux banques. C'est un scandale absolu. Le parlement a adopté l'une des législations les plus avancées d'Europe avec la loi de diligence, mais elle est contournée par les banquiers. Ils sont censés être vigilants lorsqu'ils ont affaire à des personnes exposées politiquement (PEP). Mais on voit bien que toutes les grandes affaires de détournement d'argent à travers le monde passent par la Suisse. On l'a vu avec le Brésil et la Malaisie dernièrement. Donc je m'interroge sur l'interprétation du terme PEP. 


Qu'attendez-vous du Conseil des droits de l'homme? 


Qu'il condamne l'action des banques suisses mais aussi américaines qui jouent un rôle clef dans le transfert de l'argent illicite. Mais surtout qu'il qualifie de crime contre l'humanité le prélèvement et l'accueil des sommes détournées pour les rendre imprescriptibles. Alain Jourdan

Source
Article par Alain Jourdan paru dans 24heures, REGION, mardi 19 septembre 2017, p. 9



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